Chapitre 1
Vendredi 28 Septembre
Je ne retrouverai jamais un pub avec une ambiance pareil. Regardez les danser et chanter. Je les observe, accoudée au bar, avec déjà cette sensation de vide, me retrouver complètement seule dans une ville inconnue sans eux m'angoisse déjà. Je ne verrai plus de sitôt la danse de looser de Rob's, ni même les cris stridents de Vanessa et étonnement le toc de Clo, lui aussi va me manquer. C'est ma dernière soirée ici, je n'avais pas imaginé que ça irait si vite, c'est vrai, quand j'ai postulé dans le plus grand cabinet de San Myshuno, j'étais loin de penser que je n'avais ne serait-ce qu’une infime chance que mon CV soit retenu et finalement j'ai reçu une réponse positive, c'est une occasion en or que je ne peux pas louper, ce tremplin inespéré dans ma carrière.
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- Hey ma biche, tu rêvasses ?
- Désolé je…
- Avoue, tu penses déjà à ta vie tranquille sans nous c'est ça ?
- Ne dis pas n'importe quoi !
- Non mais je comprends très bien, de l'eau chaude à n'importe quel moment de la journée, du silence, de l'intimité, plus de flatulence nauséabonde pendant les repas… Le rêve !
Elle c'est Béa, ma meilleure amie, elle ne prend rien au sérieux, c'est une fille vraiment super cool, et d'une beauté à couper le souffle, d'ailleurs tous les mecs craquent sur elle, ça en est un chouya rageant !
Elle me frictionne le dos, comme pour me rassurer, j'en ai actuellement tellement besoin, quand je leur aie annoncé mon départ, je n'avais qu'une crainte, qu'ils m'en veuillent, mais ce sont des personnes extra et ils ont compris que ma place était ailleurs à présent.
- Et les p’tites gonzesses qu'est ce que ça fait ?
- Ouvres grand tes oreilles Rob's, Susy était en train de m'avouer que ne plus t'avoir sur le dos va lui être d'un grand soulagement !
- Pas cool. Pourquoi tant de haine à mon égare Suzette ?
Comme vous l'aurez compris lui c'est Rob's, c'est pas un mauvais bougre mais qu'est-ce qu'il est relou parfois, il n'a pas de limite, il ne se rend pas compte qu'il peut être fatiguant, il m'a tourné autour pendant pas mal de temps et je n'avais pas du tout la tête à avoir une relation amoureuse, ma carrière est bien plus importante, de plus les flirts dans une coloc c'est rarement positif, on l'a bien vu avec Béa et Orasio, même l'ambiance d'une prison est plus agréable à supporter que l'atmosphère pesante d'un couple en pleine rupture vivant sous le même toit !
- Arrête Béa, vous allez tous me manquer !
- Est-ce que je vais pouvoir récupérer ta chambre à ton départ ?
- Elle n'est même pas partie que tu essaies de lui gratter sa piaule, t'es sérieux Rob's ?
- Fait pas genre Jovano, je sais très bien que tu la veux aussi !
- Quoi ? Mais tu mens !
- Je cites « je devrais avoir sa chambre, parce qu'il y a un grand dressing »
- Oui mes robes de spectacles ne rentrent plus dans le mien, mais attends au moins qu'elle n'ait plus ses valises posées sur le sol de sa chambre.
Lui c'est Jovano, oui le garçon qui crie quand on regarde un film d'horreur, il est arrivé quelques jours après moi, et on ne s'ennuie jamais avec lui, c'est un spectacle à lui tout seul, il se produit sur scène dans les petits bars du coin, je ne pourrais plus l'aider a trouver la robe qui le mette en valeur, je suppose que Vanessa fera ça très bien, comme elle fait tout merveilleusement bien, c'est agaçant parfois d'ailleurs.
- Bon, on va danser ou on va rester à se regarder dans le blanc des yeux ?
- On veut profiter de toi jusqu'à la dernière seconde et regarde Rob's, il est déjà parti faire ses plus belles danses pour toi ! Ça ne se loupe pas !
- Tu as raison Béa.
- Comme d'hab non ? Puis ne t'en fais pas, on viendra te voir !
- Et je reviendrais quand je pourrais...
- Si tu n'as pas un client super sexy qui te prends tout ton temps !
- Pas de sexe avec les clients Béa, tu le sais !
- Je trouve cette règle particulièrement chiante, mais bon !
J'ai fini par les rejoindre, pour trémousser mon popotin avec cette bande de dégénéré attachante, je ne vais pas rester au bar à me morfondre, mon sourire n'est pas le plus sincère, mais ils ont organisé tout ça pour moi. Je sais que Béa s'inquiète déjà assez, elle ne le dit pas, fait l'idiote comme d'habitude, mais elle est un peu parano sur les bords, avec toutes les vidéos de meurtres non résolus qu'elle regarde, ça ne m'étonne pas franchement. Quelques jours après l'annonce de mon départ, j'avais surpris une conversation entre elle et Rob's, ils parlaient du cadavre d'un avocat hyper prisé retrouvé coupé en morceaux dans le caniveau... ! Je n'ai jamais osé lui en parler, je ne veux pas la faire paniquer plus ou remettre ça sur le tapis, mais je connais les risques. Pour tout vous dire ce n'est ni la première ni la dernière fois qu'on retrouve le cadavre d'un avocat trop gênant... J'en ai des frissons…
- Ah enfin te voilà !
- Je ne vais quand même pas vous laisser profiter de cette soirée tout seul !
- Rob's ! Susy vient de me dire qu'elle voulait te voir danser une dernière fois rien que pour elle !
- Mais que tu es con toi !
- Ok poupée, rien que pour toi, regarde ce corps se déhancher. Imprime dans ta mémoire, ce corps d'Apollon que tu rates et que tu n’as jamais voulu !
Le clin d'œil et le bisou à distance était de trop, mais c'est tellement drôle, il a un melon surdimensionné celui là !
La fête a continué encore et encore, des heures durant, sans voir l'heure passée ni même les verres d'alcool.
- Hey les gars, il est quand même 7h du mat’ !
- QUOI ? Mais mon avion part à 9h !! Je dois être à l'aéroport dans 1h !!
- T'inquiètes pas ma petite Suzette, je vais t'y emmener moi !
- Tu es sur Rob's ? Faut qu'on passe récupérer mes affaires à la coloc avant !
- T'inquiètes beauté, ça va le faire. Je t'aurais rien que pour moi avant que tu ne partes, je ne peux pas louper ça.
Je n'aurai même pas le temps de leur dire au revoir correctement, j'avais tout programmé dans ma tête, je n'aime pas être prise au dépourvu, ça n'est jamais bon.
…
À la coloc, tout est bien calme, on se regarde dans le blanc des yeux sans même savoir quoi dire, mes valises sont là, elles n'attendent plus que moi, l'heure tourne et je n'ai absolument aucune idée de comment leur dire au revoir. Heureusement que Béa est là pour assurer à chaque malaise.
- Bon, ma belle, prends soin de toi et donne nous des nouvelles d'accord ?
- Promis. Tu vas tellement me manquer.
- Moi aussi.
- Aller Béa, laisse nous de la place, pour un petit câlin collectif !
C'était notre petit rituel en cas de coup de moue.
- Vous devriez filer avant d'être en retard.
- Au revoir tout le monde !
C'est le cœur meurtri que j'ai quitté les murs de ce qui fut les plus belles années de ma vie. Une nouvelle page s'ouvre. Mais ils vont terriblement me manquer.