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Chapitre 8

Samedi 13 Octobre (suite)

J'ai traversé toute la ville en marche rapide, je suis en retard et essoufflée, je dois vraiment me remettre au sport, peut-être qu'Erobie, voudra bien m’y accompagner, je m’en veux vraiment de lui avoir fait faux bond, ce n'est pas mon style, mais j’ai toujours fait passer ma carrière avant tout, et on ne peut pas dire que j’ai trop le choix. Non, on a toujours le choix, ça n’excuse pas mon comportement de ce soir.  Mon GPS m’indique que je suis au point de rendez-vous, mais la rue est déserte, je fais un tour sur moi-même, pas le moindre signe d'un quelconque bar, ni même d'un minuscule écriteau qui indiquerait que je suis au bon endroit. Ça m'a plutôt l'air abandonné et franchement flippant.  Dans quoi je me suis fourrée encore !


- Psit.
- Il y a quelqu'un ? Chuchotais-je.
- Par-ici Madame Vockwin !


L'homme se tient accroupi dans l'ombre, il fait trop noir et la grande capuche qu'il porte m'empêche de voir son visage.


- Suivez- moi.

 

Il pousse une vieille porte en bois, et il disparaît. J'ai bien peur que la foule que j'avais prévue en cas de pépin ne soit pas au rendez-vous. C'est entre lui et moi. J'ai une boule au ventre, soit j’y vais et je peux en apprendre plus, soit je fais demi-tour et ma carrière pourrait s’arrêter avant même d’avoir commencé. Prenant une grande inspiration, je m'introduis à mon tour dans une pièce sombre et à sentir l'odeur, elle n'a pas été ouverte depuis un moment.


- Je suis désolée pour mon retard, j'ai eu peur de vous avoir loupé.

​

Il alluma une bougie et retira sa capuche…C'est lui, je n'ai aucun doute, c'est bien l'homme que j'ai vu sur les photos à côté de Monsieur Doguets. Quelques années de différence et un visage plus fatigué et moins joueur que sur les photos de classe. Un sourire même effacé je dirais, mais c'est bien lui. Ses yeux noirs, son teint, ses cheveux couleur corbeau, tout correspond. Mais pourquoi ici ? Pourquoi un rendez-vous dans cette pièce lugubre à l'abri des regards, j’examine autour de moi et je ne vois pratiquement rien, que de la poussière, quelques tabourets empilés dans un coin, un vieux bar délabré et un miroir brisé. C'est glauque. Je suis prise d'une vague d'angoisse, avant que je ne puisse parler, il reprend la parole.


- Veuillez m'excuser pour ce rendez-vous à une heure pareille, mais j'ai appris à être prudent depuis toutes ses années. Personne ne vous a suivis ?
- Non je ne pense pas, pourquoi ? Que se passe-t-il ?
- Madame Vockwin, le dossier dont vous vous occupez, va sûrement vous mettre dans un pétrin auquel vous ne vous imaginez même pas, certains avant vous ont essayé et n'ont jamais eu le temps de terminé.
- C'est ce que j'ai cru comprendre, mais c'est juste une mauvaise coïncidence !  Ne vous en faite pas.
- Non, vous vous voilez la face, ils sont prêts à tout.
- De qui parlez-vous ?
- Je suppose que vous avez fouillé Internet ainsi que les anciens articles de journaux, vous ne trouvez pas bizarre qu'il n'y ai rien ? Absolument rien qui discrédite un tout petit peu mon ami ? Vous voulez qu'on parle des témoignages de ses amis, de ses parents qui sont partis en fumé quand le local des pièces à conviction a brûlé quelques semaines après son arrestation ? Que seul des témoignages étranges de personnes éloignées du dossier soient restés intacts ? Et que nous n'avons jamais été réécoutés.


C’est vrai qu’il n’a pas tort, j’ai remarqué plein de choses anormales dans ce dossier, depuis le premier jour où je l’ai eu en main. Et puis comment ça se fait que l’incendie du local ne soit pas stipulé ? Il devrait y être, même sur Internet, aucun article n’en parle, alors que ça aurait fait un énorme scoop, qui aurait pu avantager mon client.
 

- Je n'étais pas au courant que le local avait pris feu, rien ne l'indique dans le dossier !
- Voilà, c'est ce que je vous dis, il n'y a rien, tout est fait pour que mon ami reste en prison.
- Mais pourquoi ?
- Parce que ce n'est pas lui le meurtrier !
- Monsieur, je ne peux rien faire sans de vraies preuves... Malheureusement tout l'accable, je cherche depuis des semaines, et je n'ai rien. Pour tout vous avouer je suis même sur le point de changer d’affaire.
- Non par pitié, ne nous laissez pas tomber, vous êtes notre dernière chance ! J'avais perdu espoir, depuis des années ils font en sorte que tout soit contre lui ! Les anciens avocats ont surement été menacés, je ne sais pas, mais j'en suis certain mon ami est innocent !
- C'est déjà un peu compliqué au travail actuellement et si je ne donne rien de concret je risque d'être virée. Si vous voulez de mon aide, il va falloir que vous me racontiez plus que des pseudos doutes.
- Tout ce que vous voudrez Madame Vockwin. Vous savez je m'en veux terriblement depuis toutes ses années. C'est de ma faute, je ferais tout pour le sortir de là. Si vous ne m'aidez pas il va finir sa vie en prison pour un crime qu'il n'a pas commis !
- J'ai bien remarqué des choses dans le dossier qui ne concordent pas, j'étais même étonnée que mes prédécesseurs n'aient rien vu, mais ceci expliquerait cela.
- Vous voulez bien nous aider alors ? S'il vous plaît.
- Je vais faire mon possible. Mais avant j'ai besoin que vous me racontiez tout.


Son histoire est bouleversante, il a vraiment l'air sincère dans ses mots, je sens son émotion quand il parle, je travaille depuis assez de temps dans ce milieu maintenant pour reconnaître les menteurs. Heureusement que j'ai pris avec moi mon petit carnet pour noter toutes les infos qu'il me dit. Je suis sous le choc. Comment peut-on en arriver là, certains noms ressortent dans la conversation et ne me sont pas inconnus, si j'en crois l'homme devant moi, tout serait une pure mascarade, pour protéger quelqu'un et enfermer un innocent en prison. Je ne peux pas laisser faire ça.
 

La conversation fut coupée par un bruit à l'extérieur.


- Vous avez entendu ça ?
- Oui.
- Vous êtes sûre de ne pas avoir été suivie ?
- Certaine, enfin je crois.
- Nous ferions mieux de partir. Prenez ceci madame Vockwin.
- Un téléphone ?
- Oui un téléphone prépayé. Vous trouverez mon numéro dedans. Si j'ai un conseil à vous donner, faites attention, prenez un taxi et rentrez chez vous, continuez votre vie comme d'habitude et ne parlait surtout pas de notre conversation.
- Mais... Comment voulez vous…
- À personne, compris ? Nous devons partir maintenant.
- Monsieur Colson...

- Appelez-moi Sullivan.
 

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